Utopies et dystopies énergétiques : histoire et science-fiction

Dialogue entre histoire et science-fiction à propos des futurs passés de l'énergie. Franck Ekinci est le co-auteur d’Avril et le monde truqué, film d’animation qui imagine l’histoire de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle sans électricité1. Quelle société se serait construite si l’électrification n’avait pas eu lieu ? La question fait écho aux travaux de l’historien Charles-François Mathis (Université Bordeaux Montaigne), examinant les débats et interrogations sur l’avenir énergétique qui caractérisent la société britannique de la fin du XIXe siècle, autour du « roi charbon »2.

À l’initiative de JEHRHE, Franck Ekinci et Charles-François Mathis ont mutuellement pris connaissance de leurs travaux, à distance, avant de répondre à nos questions et d’échanger leurs points de vue.

  • 1. Christian Desmares, Franck Ekinci, Avril et le monde truqué, 2015, 105 minutes.
  • 2. Charles-François Mathis, « « Renverser le roi Charbon ». Imaginer la transition énergétique en Grande-Bretagne, 1865-1914 », Yves Bouvier, Léonard Laborie (dir.), L’Europe en transitions. Énergie, mobilité, communication XVIIIe-XXIe siècles (Paris : Nouveau Monde, 2016).

Historien

charles-francois.mathis[at]u-bordeaux-montaigne.fr

Réalisateur, scénariste et producteur de films d'animation

Le film Avril et le monde truqué est souvent présenté comme rétro-futuriste. Il se situe dans le passé, mais dans un futur non advenu de ce passé. Les historiens de leur côté travaillent désormais eux aussi sur les imaginaires passés du futur, notamment à travers la science-fiction. Pourquoi le couple histoire et science-fiction est-il si fécond ?

CFM : Les associer permet d’abord une histoire en creux : interroger les récits de science-fiction, c’est une manière, parmi d’autres bien sûr, de pénétrer les modes de pensée d’une époque, de connaître les angoisses qui agitent les contemporains, de percevoir les imaginaires qui les habitent. De cette manière, on rend aussi toute sa complexité au déroulement historique, en le débarrassant de son déterminisme, en redécouvrant les possibles non-advenus et en s’interrogeant sur ces échecs. C’est tout l’intérêt de l’histoire contrefactuelle (voir la belle analyse de Pierre Singaravélou et Quentin Deluermoz, Pour une histoire des possibles. Analyses contrefactuelles et futurs non advenus, Paris, Seuil, 2016) : se demander « et si… » permet d’évaluer la force de telle ou telle causalité communément admise, de redonner un rôle à la contingence ; bref, c’est, en quelque sorte, se libérer du poids d’un passé irrémédiable qui nous entraînerait malgré nous dans une direction et une seule. Dans le film, je trouve intéressant le choix de figer le monde en 1870, notamment par l’enlèvement de tous les savants, et d’en tirer des conséquences géopolitiques : un pouvoir policier et oppressant, des menaces de guerre constantes liées aux contraintes énergétiques, etc. C’est rappeler avec beaucoup de justesse que les choix énergétiques s’inscrivent dans un système, tout à la fois technique, social, politique, économique, etc. Le film me semble aussi devoir interroger le rôle des savants. Ici, ils sont seuls à pouvoir imaginer d’autres voies énergétiques ; or, jusqu’au XIXe siècle, l’innovation technique se faisait surtout par expérimentations, par tâtonnements, d’ingénieurs ou d’amateurs. Le rôle des savants s’amplifie de fait au XIXe siècle, mais pour autant, étaient-ils les seuls facteurs de progrès possibles ?

FE : Oui, la science-fiction et y compris celle qui porte sur le passé, questionne bien évidemment le présent… À des degrés divers, selon notre culture, notre niveau de vie, nos désirs personnels, nous sommes tous (plus ou moins) insatisfaits de l’état actuel du monde. En conséquence, il peut être réconfortant d’imaginer un déroulement alternatif de l’histoire replaçant ainsi un présent dans une perspective qui nous convienne.

D’autre part, sur un plan personnel, si j’apprécie évidemment les bénéfices technologiques de ce début de XXIe siècle, leur vitesse de déploiement et le déluge d’informations, de sollicitations (voire d’injonctions) en découlant, me déconcertent parfois quand ils ne m’effraient pas. L’idée de marquer une pause, que le monde connaisse une stase provisoire afin de laisser le temps (éthique et technique) de s’approprier ces bouleversements parait donc séduisante. D’une façon très indirecte, le film traite cette aspiration.

FE : La science-fiction, notamment à travers ses branches dystopiques et uchroniques, a fréquemment utilisé l’histoire « réelle » comme moteur narratif. Je pense évidemment au Maître du Haut Château de Philip K. Dick (les forces de l’axe ont gagné la Seconde Guerre mondiale), Rêve de fer de Norman Spinrad (délirante fiction censée avoir été écrite par Hitler), La Machine à différences de Gibson et Sterling (les ordinateurs de Babbage mus par la vapeur ont changé le monde dès le XIXe siècle), etc… Ceci établi, il m’est difficile de déterminer ce qui a motivé ces différents auteurs et donc de répondre d’une manière générale sur la fécondité de la relation entre histoire et science-fiction. Je ne peux donc exprimer que mes propres envies lors de la co-écriture du scénario avec Benjamin Legrand. En premier lieu, factuellement, disposer d’un matériau de base réel, connu de tous (en tout cas, censé l’être) contribue naturellement à donner une assise de plausibilité à un récit imaginaire. Le choix de l’époque traitée dans le film provient des considérations suivantes :

-   Le XIXe siècle et la première moitié du XXe ont été une explosion de découvertes et d’inventions dont les savants sont restés célèbres jusqu’à présent, contrairement au temps présent, où, à de rares exceptions près, les chercheurs actuels sont plutôt méconnus. La science d’aujourd’hui est plus anonyme, massivement traitée par de dizaines de milliers de spécialistes épaulés par l’informatique (Big Data, calculs ultra-rapides). Même présentées fugitivement, ces grandes figures du passé incarnent ainsi plus aisément la science pour le spectateur.

-   Il s’agissait également de présenter des pivots temporels identifiables pour un spectateur à la culture historique « moyenne » mais supposé avoir entendu parler des guerres franco-allemandes et de Napoléon III, donc pouvoir déduire qu’un Empire Napoléonien en 1941 est bien une bizarrerie…

Ensuite, comme beaucoup de personnes (je suppose), songeant à l’histoire, je me suis fréquemment questionné : qu’est-ce qui se serait passé « si »… ? Par exemple : si l’humanité avait disposé de certaines inventions plus tôt ? La technologie nécessaire à des inventions du XIXe siècle était disponible bien auparavant. Nous pourrions entendre la voix de Louis XIV et examiner son portrait réel (phonographe et photographie) ; si l’Empire romain avait réussi à perdurer quelques siècles de plus ? Si l’Inde ou la Chine avaient pris l’avantage sur l’Occident au XVIIIe siècle ? Et évidemment, si les complots contre Hitler, Staline ou autres dictateurs avaient réussi ? Si JFK n’était pas mort à Dallas ? Etc., etc… Sinon, tout simplement, la pratique du scénario étant aussi un jeu démiurgique, il s’agit également d’une envie ludique, d’une jubilation à réordonner des évènements connus selon un agencement amusant ou intrigant.

CFM : Il est amusant de constater que la pratique de l’histoire impulsée par les Annales dans l’entre-deux-guerres vise justement à se détourner à la fois des grands acteurs et du récit événementiel pour proposer une approche centrée sur les évolutions sociales, économiques, démographiques. Est-ce que cela a éloigné science-fiction et histoire pour laisser la première aux artistes, avant l’intérêt d’aujourd’hui pour l’histoire contre-factuelle ? Il y aurait là une belle étude. Par ailleurs, il est vrai que le XIXe et le début du XXe siècles ont laissé en mémoire de grands noms de scientifiques, sur lesquels le film peut en effet s’appuyer : c’est le résultat d’une glorification de l’homme de science, qui n’est pas neuve, combinée à une accélération des découvertes (facilitée par la puissance nouvelle obtenue par les énergies fossiles…) et, en France au moins, à une politique d’exaltation républicaine célébrant ses grands hommes (rarement ses femmes…).

Est-ce que l’énergie est un thème classique de la science-fiction et si oui pourquoi ?

CFM : Classique, je ne sais pas, mais récurrent, oui. C’est particulièrement vrai quand on évoque la science-fiction, car la dimension technique induit assez naturellement des questionnements sur l’énergie qui meut telle ou telle machine : ces ouvrages offrent justement des possibles, ancrés dans des contraintes physiques dont il faut tenir compte ; dans ce type de récit, on n’est pas dans la magie, comme le souligne très justement Yannick Rumpala dans son ouvrage Hors des décombres du monde. Ecologie, science-fiction et éthique du futur (Champ Vallon, 2018).

L’importance de l’énergie dans les romans d’anticipation (pour élargir au-delà de la seule science-fiction) répond à des interrogations liées au contexte d’écriture, comme c’est le cas dans les écrits du tournant du XXe siècle, qui s’intéressent particulièrement à cette dimension.

FE : Le contexte d’écriture, ou le moment historique de l’écriture, donc, est effectivement capital pour appréhender la science-fiction, genre qui, quand il aborde l’anticipation, est paradoxalement et particulièrement « datable », témoignant autant de son époque que de ses perspectives spéculées. C’est évidemment plus frappant visuellement au travers des illustrations, des bandes dessinées et des films. Par exemple, le futur selon Robida (1848-1926), et la technologie présentée dans Planète interdite (1956) ainsi que dans Alien (1979), nous renseignent sur l’état d’ingénierie technique correspondant aux périodes de la création de ces œuvres. En général, la science présentée dans la majorité des créations anticipatives n’est souvent qu’une projection, un petit « saut » supplémentaire basé sur les connaissances existantes et rarement une rupture radicale.

À ma connaissance, un des rares auteurs capables de telles ruptures, de véritables audaces imaginatives et scientifiques, est Greg Egan, maître du genre de la « Hard Science » : La cité des permutants (univers virtuel informatique), Isolation (thriller et physique quantique)…

FE : Parmi les œuvres manipulant ce thème de l’énergie dans la science-fiction, je citerai notamment : Ravage de Barjavel, qui est pour moi une matrice de nombreuses créations traitant un thème qui me passionne : la dépendance énergétique de notre civilisation et donc, en cas de pénurie ou d’accident, le mince écart nous séparant d’un retour à « l’An Zéro ».

Je pense que cette fragilité fascine beaucoup d’auteurs. En se plaçant sur une vaste échelle historique, il n’y a pas si longtemps, nous étions des chasseurs-cueilleurs sans aucun besoin énergétique massif, luttant pour la survie. Il est donc compréhensible de songer qu’un enchaînement de circonstances dramatiques affectant nos moyens de productions énergétiques interconnectés puisse nous ramener à cet état de vulnérabilité dans une nature hostile. On peut frémir en imaginant ce qui aurait pu se produire si quelques évènements aggravants s’étaient ajoutés aux désastres initiaux de Fukushima, Tchernobyl, Three Mile Island, ou actuellement à la pollution massive en Chine, notamment à cause du charbon…

CFM : À propos du charbon, je trouve remarquable la façon dont le film s’empare de tous les possibles du charbon pour décrire la vie quotidienne d’une société dépendante de cette seule source (notamment le superbe train-téléphérique) : on y trouve une logique qui fait tout l’intérêt de la démarche d’anticipation. Il y a par ailleurs, il me semble, un certain nombre de voies classiques qui se retrouvent ici comme dans d’autres récits (peut-être parce qu’on ne peut envisager raisonnablement autre chose ?) : le monde souterrain et luxuriant, par exemple, renvoie pour moi à l’un des premiers récits de science-fiction, The Coming Race, d’Edward Bulwer-Lytton, paru en 1871, qui imagine lui aussi une énergie omnipotente qu’il nomme le Vril et qui ressemble fort à l’électricité.

En l’absence d’électricité, le monde d’Avril est marqué de manière très sombre par une consommation accrue de charbon, occasionnant désordres environnementaux et géopolitiques. Cette représentation est en droite ligne des discours de la fin du XIXe siècle et des débuts du XXe siècle sur les mérites de la « fée électricité » et du progrès. D’autres futurs non-advenus étaient-ils imaginables ?

CFM : Bien sûr. De nombreux travaux actuels (ceux d’Andreas Malm ou de François Jarrige par exemple) mettent en avant le rôle d’énergies « traditionnelles » dans les débuts de la révolution industrielle : dans le textile, fer de lance de l’industrialisation, l’énergie hydraulique tout comme celle des animaux utilisés dans les manèges, étaient tout à fait centrales. De même que, sur mer, jusqu’aux années 1860, les bateaux à voile ont mené une concurrence efficace aux bateaux à vapeur. On pourrait très bien imaginer un monde d’efficacité énergétique – mais non d’abondance – reposant uniquement sur ces énergies dites renouvelables. Ceci étant, les imaginaires qui se déploient à la fin du xixe siècle reposent souvent sur l’espoir d’une énergie sauvant l’humanité, qui est la plupart du temps l’électricité. Il est très rare qu’ils envisagent une combinaison d’énergies pour assurer les besoins futurs des êtres humains. Dans le film, finalement, c’est la découverte de pétrole qui sauve le monde de la pénurie.

FE : Si le film n’est pas contre la science, traitant plutôt de la problématique de son utilisation, il est néanmoins ironique à ce propos. En effet, dans le récit, la découverte du pétrole sauve le monde de sa dépendance au charbon, mais il est signifié qu’il s’agit d’une énergie « propre et inépuisable », ce qui augure sarcastiquement de futurs problèmes…

FE : Des énergies renouvelables auraient sans doute pu être utilisées. Toutefois, et c’est personnel, je suis plutôt pessimiste. Rien n’est gratuit dans notre univers (entropie), et je pense que nous aurions connu d’autres problèmes, tant que nous serons conditionnés par une volonté de croissance perpétuelle. Ce que l’on soustrait à la nature, il faut bien le rembourser ailleurs. La fusion nucléaire sera peut-être une solution dans quelques décennies, mais je redoute notre capacité à générer des inconvénients lorsque nous disposons d’un avantage…

CFM : Je partage tout à fait l’idée qu’on ne peut traiter de cette question des autres énergies utilisables sans se référer au système économique, social et politique, et, en l’occurrence, à la question de la croissance. Si l’on reprend la distinction (discutée et qu’il faudrait nuancer) faite par l’historien de l’économie Tony Wrigley entre un régime organique basé sur les énergies renouvelables et un régime fossile, on voit apparaître deux modes de développement : l’un qui tend vers un plafond de production, limitant donc la croissance de la population et imposant des limites à la prospérité ; le deuxième brisant ce plafond en permettant une croissance globalement continue, au moins tant qu’elle peut s’appuyer sur les énergies fossiles. Toute la question est de savoir si l’on peut découpler croissance continue et fossiles – voire, pour certains, s’il est souhaitable que la croissance se poursuive (en songeant aux autres impacts non-énergétiques). Mais au tournant du XXe siècle, rares sont ceux qui pensent déjà en ces termes – tout au plus voit-on apparaître quelques utopies de la frugalité. Le rapport Meadows (Halte à la croissance !, 1972) est encore loin !

En quoi le contexte actuel relatif à la transition énergétique nourrit-il vos recherches, artistiques et historiennes ?

CFM : Le regard sur le passé est souvent modelé par les interrogations du présent, et c’est évidemment particulièrement le cas de l’histoire environnementale dont je me réclame. Le simplisme de l’approche des problèmes énergétiques aujourd’hui est parfois effarant : on attend tout de nouvelles technologies plus propres et efficaces, sans s’interroger, ou peu, sur les modes de consommation, sur les choix de société et leur dimension politique, etc. Il y a deux choses qui me frappent : une sorte de fatalisme (un avenir sans le pétrole et tous ses usages est-il possible ?), et en même temps l’espoir rarement éteint d’un salut par la technologie. Ce sont deux dimensions que l’on retrouve dans le Royaume-Uni de la fin du XIXe siècle : tenter de mieux les comprendre et de les étudier, c’est aussi, dès lors, jeter quelques lumières sur notre monde contemporain.

FE : La remarque sur les œuvres du passé revisitées par un regard du présent est très intéressante et d’actualité. Je m’écarte sans doute de la thématique du jour, mais il s’agit d’un sujet qui m’interpelle. En effet, s’il est évidemment sain de disposer d’un œil critique, on observe depuis quelques temps une dérive consistant à juger, moralement ou sous un angle sociétal, avec nos lunettes du XXIe siècle, des créations élaborées dans un contexte culturel totalement différent.

FE : Il me semble que la question concerne davantage Charles-François Mathis. Si la science me fascine et nourrit mes projets, mon intérêt pour ces problématiques énergétiques a été ponctuel, s’inscrivant dans le cadre du film, non pas que ce thème ne m’intéresse plus, mais les dernières avancées technologiques sont une mine de récits et d’autant d’interrogations : intelligence artificielle, nano-technologies, bio-chimie, informatique quantique, réalité et humanité « augmentées », etc…

CFM : Je n’aime guère l’art engagé, mais il me paraît indéniable qu’il est possible d’aborder de façon artistique certains enjeux contemporains, notamment énergétiques, comme d’ailleurs ce film le démontre de belle façon. On parle aujourd’hui d’un environmental art qui se placerait dans la lignée du Land Art. Les travaux de Chris Jordan, par exemple, comme ses séries Intolerable Beauty et Running the Numbers, dénoncent avec beaucoup de talent et d’efficacité les méfaits du gaspillage et de la société de consommation.

Dans notre monde électrifié – encore très inégalement –, on consomme plus de charbon que jamais. Qu’est-ce que ce constat vous inspire ?

CFM : Cela remet à sa juste place l’électricité, dont on oublie trop souvent qu’elle est une énergie secondaire, qui nécessite d’être produite par une autre énergie. L’électricité a été porteuse, dès ses origines (voir Alain Beltran et Patrice Carré, La vie électrique. Histoire et imaginaire, Paris, Belin, 2016), d’un imaginaire puissant : elle était par excellence une force salvatrice et destructrice à la fois. Elle offrait en ce sens une antithèse au charbon, pourtant lui aussi adossé à un imaginaire fort, lié à la vapeur, qui semblait permettre tous les possibles, mais à un prix (esthétique, sanitaire, social) élevé. Cela, le film le montre très bien : il donne magnifiquement à voir ces coûts du charbon (jusque dans l’affiche d’une palissade : « on meurt de suie ») et comment l’électricité a été vue comme un outil fabuleux, l’énergie par excellence du futur et du progrès, permettant d’échapper à la dépendance fossile. Dès lors, la coexistence poursuivie de ces deux sources (l’électricité est produite encore massivement par des énergies fossiles) a pu en quelque sorte les désenchanter et devrait permettre de rappeler qu’en terme énergétique, il ne faut pas attendre de miracle…

FE: Ce qui me frappe, c’est que notre « hyper-technologie » actuelle, notamment matérialisée par l’informatique ressentie (consciemment ou non) comme propre, moderne, dépende de l’électricité, qui provient partiellement du charbon, dont le halo lexical spontané est : ancienne énergie, XIXe siècle, pollution, saleté, mines, maladies…

FE : La collision de ces deux univers opposés, charbon-électricité, est intéressante. Je vis dans le XXIe siècle et, en procédant par exemple à une recherche Google sur l’écologie du futur, j’actionne une chaîne technologique qui nécessite (indirectement et partiellement, certes) la combustion nocive de débris végétaux sédimentés il y a des millions d’années…

CFM : C’est une remarque très juste et très intéressante (sauf pour la France, peut-être, du fait de l’importance de l’électricité d’origine nucléaire) : de fait, le monde contemporain dépend encore beaucoup de réseaux, d’infrastructures, de choix qui ont été faits il y a des dizaines d’années de cela. L’inertie des systèmes est évidemment énorme. Ce qui rend d’autant plus compliqués les efforts à faire pour en sortir…